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Edito du Monde 

SOS Halde LE MONDE | 05.03.10 | 12h53

Que Louis Schweitzer préside le conseil de surveillance du Monde SA n’interdit pas de le souligner : cinq ans après sa création, la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde) est devenue indispensable. Sous la houlette de l’ancien PDG de Renault, elle traque les discriminations dues à la couleur de la peau, à l’origine sociale, à l’âge, au sexe, à l’orientation sexuelle, au handicap, ou à des opinions religieuses ou politiques. Le rapport annuel que M. Schweitzer a présenté, vendredi 5 mars, au chef de l’Etat, témoigne qu’elle joue pleinement son rôle.

En 2009, ce sont 10 000 requêtes qui ont été déposées auprès de cette autorité, de mieux en mieux connue. Pour autant, alors que le mandat de M. Schweitzer s’achève, l’existence même de la Halde est incertaine. Nicolas Sarkozy goûte peu – il l’a montré en empiétant sur le pouvoir du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) sur la nomination du président de France Télévisions – ces autorités indépendantes qui ont tendance, à ses yeux, à se substituer au pouvoir exécutif.

Très réservé sur M. Schweitzer, dont il ne manque pas de critiquer la gestion de Renault, M. Sarkozy n’a pas apprécié que la Halde se plaigne, fin 2007, de n’avoir pas été consultée sur un projet de loi sur l’immigration. Et qu’elle récidive sur les gens du voyage.

Le président de la République songerait à intégrer la Halde dans le giron du « défenseur des droits », un poste instauré par la réforme de la Constitution, sur une idée de Jack Lang, qui doit fusionner les fonctions de médiateur de la République, de défenseur des enfants ainsi que de la commission de déontologie de la sécurité. Lors du débat sur la loi organique prévoyant l’instauration du « défenseur des droits », qui doit débuter le 31 mai, un amendement, encouragé par l’Elysée, pourrait opérer ce tour de passe-passe faisant disparaître la Halde. Une telle décision serait plus qu’une erreur, une faute.

Dans une société de plus en plus meurtrie par la fracture sociale, la Halde fait du bon travail. Elle dérange, notamment les entreprises, en se substituant souvent à l’inspection du travail puisque la majorité des plaintes touche aux discriminations relatives à l’emploi. Mais elle influence utilement la jurisprudence.

Plutôt que de la faire disparaître, il serait plus sage de la renforcer, pour accroître son efficacité dans la lutte contre les discriminations. Dans la « démocratie irréprochable », que M. Sarkozy prônait lorsqu’il était candidat à l’Elysée, les autorités indépendantes sont indispensables pour interpeller « l’hyperexécutif » sur les maux de la société. Article paru dans l’édition du 06.03.10