Les associations gay investissent le monde du travail
De Charlotte HILL (AFP) – 29/12/2011
PARIS — HomoSFèRe chez SFR, Flag! pour les policiers et gendarmes, Comin-G aux Finances ou encore Gare! à la SNCF : les associations homosexuelles investissent de plus en plus le milieu professionnel pour lutter contre les discriminations et défendre les droits des employés.
Ces derniers mois, plusieurs nouvelles structures ont été créées comme Rainbow BanquAss pour les métiers de la banque et de l’assurance ou Appel pour les personnels éducatifs.
Le collectif Homoboulot, qui regroupe huit associations dans le privé et le public (de Algo au Quai d’Orsay à Homobus pour la RATP en passant par Mobilisnoo chez France Télécom-Orange), a fêté ses dix ans cette année.
Selon son porte-parole, Jérôme Beaugé, son but premier « est de susciter la création d’associations dans le milieu professionnel » car « il y a une grosse problématique pour les LGBT (lesbiennes, gays, bi, trans) au travail qu’il faut absolument traiter ».
« Le travail, c’est le dernier tabou aujourd’hui, parce que les gens ont fait leur coming-out en famille et auprès de la plupart de leurs amis », renchérit Sylvie Fondacci, présidente d’HomoSFèRe.
Or, note-t-elle, « il y a un enjeu au travail, car il y a le risque de se faire passer sous le nez une promotion, d’être stigmatisé ou moqué. Donc beaucoup hésitent encore à le dire ».
Sur le front des discriminations, M. Beaugé affirme que « les plus fréquentes sont les moqueries, préjugés », mais il cite aussi l’accès à la formation, l’évolution de carrière et « le gros problème de la rémunération, une étude de 2010 ayant montré un écart de salaire de 5% en moyenne pour les hommes » gays.
Une autre enquête menée récemment par l’association l’Autre Cercle montre que 67% des LGBT ne souhaitent pas être visibles en entreprise « par crainte de conséquences négatives en termes de carrière ».
Les homos « obligés de se cacher »
En découle un phénomène d’autocensure très prégnant au travail, qui limite aussi les adhésions aux associations.
« Adhérer, c’est déjà un acte militant », souligne ainsi Mickaël Bucheron, président de Flag!, ajoutant que l’association, créée il y a dix ans dans un milieu « assez macho », revendique aujourd’hui quelque 500 membres parmi gendarmes et policiers et espère fédérer les policiers municipaux.
Pour M. Beaugé, les associations luttent pour « la visibilité » car dans les entreprises où le sujet est abordé, les salariés « se sentent mieux, ont beaucoup moins cette peur ».
Il souligne que les plaisanteries homophobes, qui ne sont souvent pas perçues comme offensantes par leurs auteurs, « se réduisent d’office dès qu’il y a une information des ressources humaines, des salariés, sur la problématique ».
Mais, note-t-il, créer ce type d’associations n’est pas aisé, les employeurs commençant souvent par nier le problème.
Philippe Chauliaguet, qui préside Comin-G à Bercy, confirme que la création de l’association en 2004 a été un processus « long et difficile », relevant qu’il a fallu attendre 2007 pour que le site de l’association, « bloqué comme un site pornographique », puisse être accessible depuis les postes de travail.
Confirmant que « le travail est un peu le dernier rempart du coming-out », il souligne qu' »il y a beaucoup à faire pour faire comprendre à nos collègues que des homos à côté d’eux se sentent obligés de se cacher ».
Les associations sont aussi amenées à jouer un rôle de conseil, Flag! comme HomoSFèRe indiquant être sollicitées sur la « nouvelle problématique » de l’homoparentalité.
Pour M. Beaugé, la situation des homosexuels au travail est encore « très très loin du compte » et « seules les entreprises ont le pouvoir d’inverser la tendance. A partir du moment où elles communiqueront sur le sujet, les personnes n’auront plus à se cacher ».
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