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La policière Sihem Souid sort aujourd’hui «Omerta dans la police», un livre où elle raconte par le menu l’homophobie qu’ont subie une de ses consœurs et sa compagne.

 

«Dans la police, on n’a pas le droit d’être homo, d’origine maghrébine ou d’origine africaine», tranche la policière Sihem Souid (photo). Avant de nuancer: ce n’est pas une généralité. Reste que «certains collègues» côtoyés à la police aux frontières (PAF) d’Orly ont, selon elle, maintes fois violé les principes républicains par homophobie ou racisme. Parfois, le harcèlement est si intense qu’il use et brise des vies… Sihem Souid raconte entre autres le calvaire d’un couple de policières lesbiennes dans Omerta dans la police, disponible en librairie à partir du 14 octobre.

 

TÊTUE: Dans votre livre, vous racontez le sort de votre ex-collègue Nadia, qui a beaucoup souffert des remarques et insultes homophobes de ses collègues…

Sihem Souid: Je voyais aussi comment certains collègues traitaient les gens en situation régulière ou irrégulière… Mais c’était ponctuel, ça durait cinq minutes, et après je ne voyais plus rien. Mais ma collègue homosexuelle était dans le bureau d’à côté, et les murs sont fins. Toute la journée, pendant des mois, j’ai entendu tout ce qu’elle subissait. J’assistais aux brimades que subissait cette jeune fille. C’était horrible! Ils voulaient l’amener au suicide, la petite! Elle arrivait à peine à se défendre et toute la hiérarchie, qui entendait ça, ne faisait rien. Je me suis demandée où j’étais!

 

Vos problèmes avec la police ont commencé lorsque vous avez décidé de témoigner du harcèlement homophobe dont était victime Nadia. Qu’est-ce qui vous a poussée à agir?

La première semaine, ça m’a choquée, mais je me suis tue. A un moment donné, je ne pouvais plus me taire, ma conscience me rattrapait… Quand Nadia, qui était adjointe de sécurité, et sa compagne, la brigadier-chef Eve C., ont porté plainte, une amie en commun est venue me voir et m’a demandé si je pouvais faire une attestation. J’ai dit: «Pas de problème, je la fais!». Puis j’ai été convoquée à l’IGS (Inspection générale des services, ndlr), et la machine à broyer s’est mise en marche contre moi. Nadia, elle, a été licenciée et elle ne veut plus parler de tout ça.

 

Les homosexuels sont-ils vraiment mal vus dans la police?

Je ne connais pas d’hommes homosexuels mais la police est un monde de macho. Déjà nous, en tant que femmes, on a du mal à se faire accepter. Pour eux, les homosexuels, ce sont des tapettes. Quand j’ai témoigné en faveur de mes collègues homosexuelles, mon supérieur hiérarchique m’a dit: «On aura tout vu dans la police! Une Arabe qui témoigne en faveur de tapettes!» Je lui ai répondu: «J’aurais tout entendu! Ce n’est pas normal: homosexuelles ou pas, elles font bien leur travail. On n’a pas à les juger en fonction de leur orientation sexuelle, mais de leurs compétences professionnelles.» Son discours m’a choquée, révoltée et donné encore plus envie de continuer.

Photo: H.B./TÊTU.

Source TÊTU

 

Omerta dans la police
De Sihem Souid
Ed. Le Cherche Midi

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